Port Autonome de Marseille. Septembre 2013. C’est sous un beau soleil de septembre que se tournent les dernières scènes de la nouvelle saison de Caïn. Ici est planté le décors du commissariat de la série. Plusieurs scènes du dit commissariat seront tournées dans la même journée et on les verra dans différents épisodes de cette saison 2. A commencer par une séquence avec l’excellent Philippe Nahon (Les beaux mecs, Mafiosa), guest de luxe de cette nouvelle saison, en « beaux mecs », c’est-à-dire en chef de gang à l’ancienne, confronté à une nouvelle génération de malfrats.
Le décors est spacieux, très bien reconstitué mais toujours source d’efforts pour Bruno Debrandt et son fauteuil, qui doit ainsi se frayer un passage au milieu des câbles, caméras et autres nombreux bureaux. Et l’on devine la chaleur écrasante qu’il a du faire en plein été, et surtout en pleine canicule durant de longues semaines, afin de mettre dans la boîte les nouvelles aventures de Fred Caïn. Mais le résultat est là, on peut juger sur pièce.

Lancée en octobre 2012, Caïn nous présentait un flic peu ordinaire, portant le même nom que le premier criminel de « L’Histoire ». Fred Caïn est un flic arrogant, limite désagréable, mais doté d’un flair infaillible pour la traque aux criminels. Particularité de ce flic hors paire: il est en fauteuil roulant depuis un terrible accident. Accident qui n’a pas atténué, loin s’en faut, sa verve envers « les valides » ou « bipèdes » comme il les appelle. Dans la saison 1, Caïn va s’efforcer de tester sa nouvelle partenaire, Lucie Delambre (Julie Delarme), la poussant au bout de ses limites. Si le modèle des enquêtes n’a pas trop changé d’une saison à l’autre, Caïn apparaissait en saison 1 un poil trop agressif. Mais dans ces nouveaux épisodes, les choses ont changé…Enfin un peu.

Cette saison 2 bouscule les codes de la saison 1. Une seule enquête occupe désormais chaque épisode, et cela tourne plus maintenant au jeu de chat et de la souris entre Caïn et le suspect assez vite identifié. Bien que la presse s’en soit donnée à cœur joie en saison 1 pour comparer Caïn à House, c’est davantage du coté de Columbo qu’il faut rechercher des points communs. Car tout comme dans son illustre modèle, l’élément le plus important dans Caïn n’est pas tant de savoir « qui? » (whodunit classique) mais plutôt « comment » Caïn va le coincer. Et comme pour l’inspecteur Columbo, Caïn peut compter en face de lui sur d’illustres guests. Dans cette saison, on pourra apprécier entre autre Claire Borotra, Daniel Russo, Marie Kremer ou encore Christine Citti.
Sur un modèle de polar façon années 80-90, Caïn s’immisce personnellement dans les enquêtes, se lient avec les suspects, se met lui-même en danger,…Point de vraisemblance dans ces affaires, seul compte le face à face. Au point que par moment, on se plait à penser que, bien que les partenaires flics de Caïn soient tous très bien campés, il n’y a que peu de place pour chacun d’entre eux entre dans cette traque qui se joue sous nos yeux. Ils sont parfois un peu des faire-valoir.

Pour incarner Caïn, la production a fait appel au talentueux Bruno Debrandt que l’on a déjà pu voir entre autre dans la série Engrenages. Et je parle bien « d’incarner » un personnage tant c’est une vraie rencontre entre ce comédien et ce rôle. Dans cette saison 2, il donne à son personnage beaucoup plus d’humanité, et il se dévoile beaucoup plus, comme lors de son face à face avec le médecin qui l’a opéré lors de son accident et à qui il reproche de l’avoir « ressuscité« . Ou quand il retrouve un vieil ami à lui surnommé « Abel », tout comme lui prisonnier de son fauteuil. Debrandt est juste parfait pour être Caïn. Dommage qu’on ne lui donne pas toujours pour des scènes importantes de partenaires à sa hauteur…Petit digression à cet instant mais je ne peux m’empêcher d’être vraiment énervé quant à la capacité qu’ont certains comédiens à systématiquement non seulement totalement foirer leur prestation mais aussi tirer vers le bas celles et ceux, pourtant brillant, qui gravitent autour. Je ne citerai pas de nom mais une seule personne correspond dans cette saison à cette description (à vous de jouer. Si vous trouvez, c’est vraiment dommage pour cette personne). Rôle après rôle, univers après univers, cette personne se rate complètement et pourtant ne cesse de tourner. C’est un des grands mystères de ce métier…

Enfin terminons par la relation Caïn-Delambre qui avance bien cette saison. Leur rivalité limite agressive de la saison 1 s’est petit à petit muée en un petit jeu de séduction. Pas très original, donnant l’impression par moment d’être totalement factice, il donne un peu de piquant à leurs rapports et permet à sa partenaire d’exister à côté de lui, pas toujours très facile quand on a un personnage fort comme héros. Et comme en France on a du mal à étoffer les personnages secondaires, on leur donne parfois de la consistance de manière un peu gratuite. Heureusement, Lucie Delambre peut compter sur son interprète Julie Delarme pour lui donner tout le charme et le caractère nécessaire. Il est d’ailleurs très judicieux d’avoir rendu ce personnage plus glamour qu’en saison 1, toujours « enfermée » dans de gros anoraks… Cette année, Lucie s’affirme non seulement en tant que flic en prenant sa place auprès de Caïn, mais aussi en tant que femme et son regard sur Caïn change… un peu…On verra où leur relation les mènera en saison 3.
J’espère pas trop loin. Je n’ai pas envie que toutes les séries policières françaises tentent de se la jouer Bones ou Castle!! Il y a déjà bien assez de France 2 pour dupliquer à l’infini le modèle de duo de flics que l’on retrouve sur son antenne. Ce n’est pas compliqué, toutes ces séries jouent sur ce modèle « Clair de Lune« : Duo, Détectives, Cherif,…Un peu dommage quand on sait tout les possibilités que permet le polar.

La saison 2 de Caïn se révèle bien plus agréable que la première. Les histoires, sans être terriblement originales, sont beaucoup plus agréables, le personnage de Caïn a évolué comme il le fallait et la série a pris un virage plus intéressant. Pour la saison 3, on souhaite que les personnages secondaires soient davantage fouillés et que les auteurs introduisent une bonne dose de feuilletonnant, comme un ennemi récurrent pour Caïn. Un Némésis qui le fasse encore plus vaciller dans ses certitudes de flics. 

Source: France 2
Crédits Photos séries: © François LEFEBVRE/ France 2
Crédit Photo tournage: © Alexandre Letren
Merci à François Mével (Blue Helium) et Véronique Hallu (France 2) pour le déplacement sur le tournage de la série à Marseille
Retrouvez Bruno Debrandt et Bertrand Arthyus (Auteur et réalisateur) dans LA SERIE SUR LE GATEAU